Comment faire naître une nation terroriste
Comment faire naître une nation terroriste
– par le général Abdel Fattah al-Sissi (avec un petit coup de pouce de Le Drian et Macron).
Au lendemain de l’attaque terroriste la plus aveuglément meurtrière d’Égypte ces dernières années, al-Sissi a déclaré trois jours de deuil national (bientôt il y aura malheureusement plus de jours de deuil national et de Tour Eiffel éteinte que de jours fériés…) et une frappe sans merci des foyers terroristes au Sinaï.
Attends ? Mais on sait où se trouvent et comment éliminer les foyers terroristes au Sinaï ? Ahhh et on l’a pas fait avant ? On a attendu la mort inutile de centaines de personnes et d’enfants ? Personne n’est dupe. Il est impossible d’éliminer les foyers terroristes par quelques bombes tombées du ciel au hasard d’un GPS, tout simplement parce qu’ils sont constitués en groupuscules au sein même de la population. Donc on bombarde. On tue au passage quelques dizaines de civils innocents, des victimes collatérales dira-t-on. Résultat ? Walou. Rien. Ou plutôt si. Des populations qui se radicalisent encore plus, des graines de terreur supplémentaires qui ne demandent qu’à céder aux sirènes du premier barbu venu, en se faisant exploser pour un paradis espéré et une cause plus grande que soi qui manquait simplement à sa vie.
C’est fou, parce que l’histoire semble se répéter sans fin. En Irak, en Syrie, la France a aussi vendu ses armes à des régimes qui tournaient à la dictature et bombardaient leurs propres populations en se justifiant par la lutte contre le terrorisme.
Alors le ministre Le Drian était en Égypte il y a 15 jours pour boucler la vente de 12 avions Rafales supplémentaires. Macron à invité al-Sissi en visite d’État à Paris le mois dernier. Tout en déclarant que côté Droits Humains tout allait pour le mieux au pays des pharaons, et que donc on soutenait sans limite la lutte du gouvernement égyptien contre le terrorisme. Sachons donc que les bombes qui tomberont au Sinaï sont made in France, de même que celles qui pendant longtemps sont tombées en Syrie (avant que le vilain Assad ne tombe en disgrâce et se tourne vers ses amis russes, un rien plus compréhensifs) et celles qui tombent chaque jour au Yemen depuis l’Arabie Saoudite, sous prétexte là-aussi de lutte anti-terroriste.
Mais depuis quand un bombardement a-t-il stoppé un mouvement terroriste ? Paris, Nice, Bruxelles, Londres, Egypte, Irak, Afghanistan…les attaques terroristes sont quasi quotidiennes et les bombes pleuvent. Mais les pluies de bombes sont le meilleur engrais des graines de terreur !
Au même moment, ironie de l’histoire, la police égyptienne empêchait la projection d’un film de cinéma – The Nile Hilton Incident – au Caire, sous prétexte de…de quoi d’ailleurs ? Ce qu’il s’y dit ne plaît pas au régime al-Sissi, et pour cause, c’est une fiction on ne peut plus réaliste sur l’état permanent de corruption et de déliquescence de la police et des autorités égyptiennes en général. Alors oui, censurer ça va mieux que de réformer.
Cinéma interdit, sites Internet d’information fermés, ONG démantelées, importation de livres de littérature bloqués en douane, arrestations arbitraires…tous les signes de l’installation d’un régime dictatorial sont au vert en Égypte.
Les pays Européens, la France en tête, ont signé une belle charte pour s’interdire de vendre des armes aux pays qui pourraient en faire usage contre leur population. Ba-boom dans le Sinaï, mais à part ça, dixit Macron et Le Drian, « il n’y a pas de problème de Droit de l’Homme en Égypte ».
Donc ba-boom. Des bombes bien françaises sur la gueule et plus de cinéma.
Silence et patience – 🇪🇬 مصر
Pour aller plus loin:
A propos du film « The Nile Hilton Incident »
A propos des rapports entre la France et le gouvernement actuel en Égypte
A propos de l’interdiction de projection du film « the Nile Hilton Incident » au Caire